Nul n’est bien sûr de l’étymologie du mot « bistro » dont l’usage s’est répandu il y a un siècle seulement. Mais l’étymologie russe, est la plus séduisante : lors de l’occupation russe de Paris en 1814, les soldats cosaques s’arrêtaient boire dans les cafés mais, de peur d’être surpris à une activité non autorisée pendant le service, ils insistaient pour être servi vite (en russe : быстро).
Du reste, bistro se dit bistro dans plusieurs langues européennes et est compris partout (l’une des illustrations de ce billet vient de Paris, l’autre de Stuttgart), même si le français y a ajouté un t final, par conformité aux usages orthographiques).
Bistro. Festina lente. Se hâter lentement, prendre le temps de faire une pause salutaire au bistro.
Les bistrots ferment les uns après les autres, déplore-t-on régulièrement. De fait, il existait en France 210 000 bistrots en 1960 et seulement 35 000 cinquante plus tard… La lutte contre les excès du tabac et de l’alcool ajoute encore à la crise. Mais le bistro, comme toute institution, mute au gré des flux de populations et des habitudes des consommateurs. L’essentiel est qu’il préserve sa spécificité, son âme.
Dans son livre France bistrots, Gilles Pudlowski le définit comme « un lieu où l’on a envie de revenir ». Bien sûr, car c’est un lieu éminemment social.
Le bistro est indubitablement porteur des valeurs mises en avant de nos jours dans le monde du travail :
- la convivialité, la mixité sociale et la limitation de la relation hiérarchique au strict minimum : il y a le patronne ou la patronne (parfois les deux) et les autres, qui participent chacun avec sa personnalité de la bonne ambiance générale ;
- l’émulation : l’hiver, un vin chaud et une partie de cartes pour redonner du cœur à l’ouvrage ; l’été, un piconcu pour rafraîchir les idées (voir ou revoir la recette par Raimu-César ici) ;
- la communication : les brèves de comptoir ;
- être au fait de l’actualité, avec le plat du jour ;
- la véracité des informations : or, in vino veritas ; évidemment, il ne faut pas abuser car on risque l’effet inverse, c’est-à-dire la gueule de bois et, par conséquent, la langue de bois…
- et la continuité de service : le bon bistro est ouvert sept jours sur sept.
Alors, pourquoi ne pas fréquenter davantage les bistros ? Pourquoi ne pas travailler plus souvent au bistro ? Et pour s’imprégner des bonnes pratiques, pourquoi ne pas enseigner au bistro ? Aristote enseignait bien en se promenant dans la rue…