Paris, ville intelligente. On n’y est pas encore mais il faut espérer car cela permettrait sûrement d’éviter ça :

Photo prise boulevard de Sébastopol (Paris, 1er) le dimanche 19 juillet 2015 après-midi. J’interprète cet amas de bouteilles vides comme un dysfonctionnement de l’organisation de la collecte des ordures ménagères dans la capitale française (1ère destination touristique en Europe). Mais peut-être que je me trompe. C’est peut-être voulu, un clin d’œil pour illustrer le titre du film (Je suis mort mais j’ai des amis) annoncé sur l’affiche publicitaire plantée à gauche du conteneur, juste à côté du scooter ? Ou bien c’est une œuvre d’artiste éphémère (œuvre éphémère ? artiste éphémère ? les deux ?) pour exprimer la gueule de bois du dimanche matin ? Ou encore, hypothèse hélas plus vraisemblable, le jemenfoustisme des consommateurs qui entassent les résidus de leurs beuveries sur le trottoir sans prendre la peine de les jeter dans le conteneur qui n’est peut-être pas plein. Tout est possible, en l’absence d’écriteau revendicatif.

Donc, avec un système urbain intelligent, les 941 « colonnes à verre » de Paris seraient connectées et enverraient des informations immédiates sur le degré de leur remplissage et signaleraient les débuts d’amoncellement de bouteilles hors conteneurs. La cartographie des conteneurs de verre et de leur taux de remplissage ainsi constituée en temps réel serait connectée au planning des équipes des services d’entretien, en lien avec la flotte de véhicules dédiée à cette opération. On saurait ainsi rapidement que le dimanche matin, les conteneurs débordent et que la circulation dans Paris est fluide. Merci les algorithmes !

Cela peut fonctionner si le ramassage est juridico-socialement possible aux heures  où les bouteilles vides sont déposées (ce qui reste à vérifier) et si le budget permet de le faire. En fait, l’idéal serait que les consommateurs, usagers successifs du liquide puis du collecteur, soient eux aussi connectés, de sorte que, lorsqu’ils sortent de chez eux, l’adresse de la colonne de verre la plus proche et/ou la moins pleine leur soit automatiquement signalée, puis que, arrivés à ladite colonne, un message (SMS, pop up sur les lunettes intelligents, bracelet sonore…) les encourage à ne pas déposer lâchement leur charge sur le trottoir (« Soyez des buveurs éco-responsables ! ») et à utiliser les ouvertures caoutchoutées de la colonne pour y glisser les reliefs de leurs arrosages.

Le gros avantage est que l’application ad hoc pourrait du même coup identifier les marques et le nombre des bouteilles, afin que, grâce à quelques retransmissions de données personnelles bien négociées, les consommateurs puissent être avisés sur leur smartphone des promotions et nouveautés sur leurs boissons favorites. Précieux algorithmes !

Tant qu’à ficher tout le monde, administrés, touristes, sans-papiers…, on pourrait imaginer une uberisation de la collecte du verre : quand un consommateur riverain veut se débarrasser de ses bouteilles vides, il se connecte à l’appli « bouteillesvidespop » et un des nombreux SDF du quartier (je parle en connaissance de cause pour le boulevard de Sébastopol) reçoit une notification sur son smartphone (subventionné par la préfecture dans ce contexte collaboratif) et passe les chercher chez le riverain (qui peut ajouter, à titre de « pour boire », quelques fonds de bouteilles dont il veut se débarrasser), à charge pour le SDF de porter les bouteilles dans un conteneur non saturé, avec notification par le conteneur au client que l’opération a bien été réalisée. On peut même imaginer que le SDF y gagne un bonus pour son dossier administratif en préfecture. Pour le financement, c’est facile : tous les touristes qui entrent sur le territoire virtuel de l’arrondissement concerné sont automatiquement géolocalisés et délestés de cinquante centimes d’euro sur leur compte (la réglementation reste à mettre en place mais ce n’est pas plus difficile que la taxe sur les billets d’avion) ; cette mini-contribution, un genre d’octroi-propreté, sert à constituer le fonds à se partager en temps réel.

Exemple : dimanche à 11 h, on a 100 riverains qui veulent déposer des bouteilles vides + 1000 touristes qui arrivent dans le 1er arrondissement + 10 SDF disposés à gagner quatre sous (les SDF sont levés depuis longtemps parce qu’on ne fait pas la grasse mat sur les trottoirs de Paris). Ça donne un fonds de 500 euros, réduit à 450 après prélèvement des frais de fonctionnement de l’appli « bouteillesvidespop » (10%). 450 € à se partager entre 100 clients, soit 4,5 € pour débarrasser un riverain de son sac de verre ; un SDF qui « fait » 10 clients peut se « faire » 45 €. S’il y a 5000 touristes et 50 riverains, et toujours 10 SDF, on peut mettre la taxe à 20 centimes, ce qui donne un fonds de 1000 euros et 900 après le décompte des frais ; avec une répartition équitable des riverains-clients, cela fait un gain potentiel de 90 euros par SDF. Etc. On est donc au plus près du besoin de chacun et même l’État y trouve son compte (organisation de la ville plus policée) ! Merci les algorithmes !

 

 

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