Un couple d’enfer !

Le virus est un parasite destructeur. Qu’il s’attaque aux êtres vivants ou aux systèmes informatiques, il s’ingénie à démolir ce qui fonctionne. On ne lui connaît pas d’autre objectif que de se repaître de la maladie d’autrui et de prospérer pour nuire encore plus. En informatique, il prend la forme d’un petit programme vicieux qui bloque les opérations ou corrompt les données. Si les données attaquées représentent des informations uniques, des traces essentielles à l’activité et à la défense des droits, le dommage peut être terrible.

Parallèlement, la mérule, surnommée « le champignon des maisons » ou « l’ogre des boiseries », se repaît de cellulose : charpente, meubles, plinthes, qu’elle consomme entièrement, faisant de la maison un tas de poussière… La mérule a développé un goût particulier pour le papier qui est de nos jours fabriqué à base de bois (le papier chiffon, c’était du temps de nos aïeux). La mérule repère sa proie, dans une cave humide où des archives ont été reléguées, voire abandonnées, et s’introduit subrepticement dans la masse pour la déguster à loisir, l’appétit venant en mangeant.

Ces deux agents destructeurs ont plusieurs points communs :

DISCRÉTION

EFFICACITÉ

DANGEROSITÉ

  • ils ne se voient pas ; ils se cachent à l’intérieur de leur proie ;
  • ils se propagent et anéantissent leur victime avec une rapidité remarquable ;
  • en raison des deux précédentes qualités, il est très difficile de contrer le parasite une fois qu’il s’est installé.

Il serait curieux de faire une expérimentation sur le sujet pour savoir qui, du virus informatique pour les fichiers numériques ou de la mérule pour les archives papier, est le plus destructeur. Si des personnes sont intéressées, merci de me contacter.

Les deux compères ont partie liée lorsqu’ils agressent de concert un fonds d’archives mixtes (ou hybrides) c’est-à-dire composé à la fois de papier et de données numériques, cas de figure très courant aujourd’hui. Et le virus et la mérule sont loin d’être menacés de disparition tant le nombre de documents et de fichiers est grand.

N’y a-t-il rien à faire contre ce fléau ? Le risque zéro n’existe pas et on n’est pas à la veille de l’inventer mais, en attendant, quelques mesures d’hygiène documentaire quotidienne, dictées par le bon sens et le sens des responsabilités réduisent facilement 90% des risques. L’opération est simple et se réalise en deux temps : 1/identifier ce qui doit être protégé ; 2/ le conserver dans un lieu sain et surtout surveillé. Pourquoi se priver ?

Pour être écologique et ne pas détruire ces espèces (même si elles ne sont pas protégées), on pourrait envisager la mise en place de virusseries et de méruleries, petits lieux archivistiques bien étanches où on déposerait (sciemment) les documents et fichiers inutiles, pour une élimination par des voies naturelles.

À noter au passage que mérule est également de genre masculin :  le mérule. Les fonds d’archives hybrides peuvent ainsi être attaqués aussi bien par le virus et la mérule (plutôt les fonds hétéroclites) que par le virus et le mérule (quand les fonds sont plus homogènes).

 

 

4 commentaires

  1. Comme documentaliste, je suis moins touchée par les mérules, et (je croise les doigts et touche du bois traité) j’ai eu la chance de ne pas croiser le passage d’un virus virulent, mais j’ai eu affaire à une sournoiserie courante et dévastatrice : la panne. La panne d’ordinateur irréparable, la panne de réseau irrécupérable, l’effacement de site irrémédiable. Mais je suis une maniaque de la sauvegarde (quotidienne, hebdomadaire, sur trois supports différents). Quand on m’a annoncé la catastrophe (deux fois au travail, une fois chez moi), j’ai hurlé, râlé… et trois heures après ( pourtant je ne suis pas douée, et très archaïque dans mes sauvegardes), j’avais tout remis en place sur le nouvel engin ou le nouveau réseau, architecture et logiciels compris. le B-A BA :
    1. classement et désherbage régulier
    2. sauvegarde régulière
    J’ajouterai : procédures simples et connaissances minimales des outils dont on se sert quotidiennement (les logiciels) pour éviter d’être à la merci d’un professionnel plus ou moins compétent et disponible (délai d’intervention dans un collège public rural de l’informaticien : un à deux mois…).
    Par contre pour mon fonds papier rien n’est vraiment prévu pour la sauvegarde, mais la conservation (longue durée) de ce fonds n’est pas une priorité. A moins d’un incendie, son triste destin est de disparaitre lentement par désherbage successif, pour mieux renaître de ses nouveautés.

    • Merci pour ce témoignage qui rappelle que l’archivage est d’abord du bon sens et qui met en exergue l’adage ‘Sauvegarde-toi toi-même »…
      Concernant la sauvegarde des archives papier, il faut rappeler que lors que l’Ordonnance de Saint-Germain-en-Laye sur l’obligation de tenue en double des registres de baptême, mariage et sépulture (1667) était exactement une mesure de sauvegarde des données nationales : créer une copie systématique des actes officiels majeurs. Et je dois avouer que, malgré des années d’études d’archiviste, où je ne crois pas que l’on m’ait jamais présenté des choses dans ces termes-là, j’ai, lorsque j’étais archiviste départementale, organisé la conservation de la collection originale (communale) et celle de sa sauvegarde (exemplaire du greffe) dans le même magasin d’archives (le critère mis en avant était uniquement la facilité d’accès), ce qui ne m’a jamais été reproché par qui que ce soit… Le bon sens est donc la chose du monde la mieux partagée mais il y a de la marge de progression…

  2. Dommage que ce texte ne soit pas en anglais, nos amis Maltais apprécieraient bcp… leur bibliothèque nationale est vermoulue a un point de non retour – et les pièces rares des archives cléricales se font soigner dans l’ancien hopital militaire de Biggy – à la pincette et aux bons soins des mains d’experts restaurateurs. A l’atelier ils ont une affiche avec les portraits de tous les vers du bois et du papier qui ont dévasté des milliers de pièces uniques ( (les criminels….)

    • Merci, Alice, pour cette alerte! Il n’est peut-être pas trop tard pour traduire le billet en anglais… avec une illustration maltaise… A vous lire, la mérule est nettement plus terrible que le virus. A bientôt.

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