Le mot conventicule remonte au XIVe siècle et désigne une « petite assemblée », c’est-à-dire la réunion périodique d’un petit groupe de personnes, bien identifiées, mais il ne s’agit pas de m’importe quel rassemblement. Le conventicule suppose une intention de secret et de partage initiatique, ou bien de complot ou de sédition, selon le point de vue où on se place.

Le conventicule est donc solennel, honorifique ou valorisant pour ceux qui y participent, et suspect pour les autres qui n’y sont pas admis ou qui ont de bonnes ou mauvaises raisons de penser qu’on ne dit pas de bien de leur personne dans cette-assemblée-là. L’image du conventicule est fort différente selon que l’on en est ou que l’on en est pas.

Ceux qui sont extérieurs pourront être tentés, pour qualifier les membres du conventicule, d’user de l’expression « trois pelés et un tondu », expression très ancienne également et peu aimable, pour minimiser la valeur et le poids de l’assemblée.

Le terme conventicule est assez vieillot dans la langue française mais la chose se porte toujours bien car elle est liée à la nature humaine, à ses aspirations d’entretenir secrets et traditions, aussi bien qu’à ses travers de se méfier de ceux qui ne font pas comme tout le monde et qui de surcroit le font en groupe comme :

manger de la viande rouge le Vendredi Saint,

collectionner les étiquettes de fromages au lait cru,

etc.

On touche là à la liberté d’association qui est une conquête sociale pas si ancienne (un siècle et demi). Mais la liberté des uns s’arrête où commence celle des autres. Le conventicule en soi n’a rien de gênant. Le conventicule est une réunion privée. Grand bien fasse le conventicule aux conventiculeurs et conventiculeuses de toutes obédiences !

Ce qui, en revanche, peut prêter à contestation, ce sont les tentatives de certains conventicules pour imposer de nouvelles règles, pratiques ou modes à l’extérieur du conventicule. Ce qui est ennuyeux, c’est l’activisme prosélyte.

Cependant, avec les chamboulements de l’ère numérique et le vieillissement des institutions, il me semble qu’on assiste à l’émergence d’un genre nouveau : le conventicule officiel. L’expression se prête bien en effet à ces nombreux comités et commissions, institués jadis ou naguère par l’administration pour étudier des problèmes de société, émettre des avis, voire produire des documents de référence, et qui, après quelques années de travail peut-être effectif et efficace, se sont endormis dans la routine, ont perdu leur représentativité dans le domaine où ils interviennent, sont en décalage avec la réalité de la société, de sorte qu’ils méritent le joli nom de Théodule.

Ces instances continuent néanmoins de se réunir, par la force de habitude et le sacro-saint principe français qu’on ne supprime jamais de couche au mille-feuille, quoi qu’on en dise. Elles ronronnent, fomentent quelques écrits marginaux qui connaîtront une diffusion d’estime dans un cercle restreint. Elles font font figure de conventicules officiels.

Et la vie continue…