Le pécule est une petite somme d’argent (modestie du suffixe) qui présente trois caractéristiques :

  1. elle est le fruit d’un travail ou d’une activité
  2. qui se déroule dans un contexte de dépendance à autrui,
  3. et elle ne peut être utilisée que dans certaines conditions.

Le pécule désigne notamment les économies amassées par un esclave (dans l’Antiquité), lui permettant de racheter sa liberté, ou encore l’argent gagné par un soldat ou un détenu et qui lui est restitué le jour de son départ, sans oublier le récent « pécule de vacances » avec lequel l’employeur rémunère les jours de congés du salarié.

Au-delà de l’esclavage, de l’armée, de la prison ou des vacances, le pécule est une richesse accumulée progressivement au cours du temps quand on effectue une opération qui profite à un tiers.

Cette définition s’applique assez bien aux données personnelles qui s’accumulent dans le big data :

  1. les données personnelles – ou plus exactement les données à caractère personnel – constituent une richesse ; ce n’est pas de l’argent à proprement parler mais ces données sont monnayables et monnayées : savoir que vous êtes enchanté(e) de votre récent voyage au Brésil, que vous allez régulièrement au restaurant ou que votre couleur préférée est le rouge, ça vaut de l’argent !
  2. les données qui résument votre identité et surtout celles qui décrivent vos habitudes alimentaires et vestimentaires, vos amis, vos déplacements, vos lectures, vos goûts, et qui alimentent le big data, sont le plus souvent produites dans le cadre d’un enchevêtrement de CGU (conditions générales d’ utilisation) qui, finalement conduisent les individus à travailler gracieusement pour l’un ou l’autre gros bonnet du commerce en ligne ou de l’Internet, même si cette autorité ne pèse pas au quotidien sur les travailleurs du big data; en publiant vos photos de vacances sur les réseaux sociaux, en « likant » telle page web (ce n’est pas par hasard que le « Je n’aime pas », voire le « Je déteste », n’est pas prévu…), ou en payant avec une carte de fidélité de telle enseigne, vous créez un pécule numérique qui est géré par l’hébergeur, la banque ou une organisation aussi discrète qu’efficace ;
  3. vous pouvez mettre fin à cette servitude volontaire envers tel ou tel patron du grand réseau et recouvrer votre liberté en supprimant vos comptes et abonnements divers mais vous devrez alors abandonner aussi vos données ; certes, vous en serez toujours propriétaire et vous pourrez les réutiliser vous-mêmes mais elles sont pour vous dépourvues de leur valeur marchande ; les données véritables, celles qui ont de la valeur, sont celles qui resteront aux mains du gestionnaire de vos transactions ; vous ne récupérerez pas le fruit de votre activité ; vous ne récupérerez pas votre pécule.

Les données personnelles sont bien un nouveau type de pécule : un petit pécule pour l’individu… et un gros trésor pour l’Organisation.

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